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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 5, 1748.djvu/101

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Carlin.

L’avez-vous vu ?Non.C’est assez mal débuter.
Quoi, vous, l’époux futur de sa fille Isabelle,
Vous n’allez point chez lui ? La méthode est nouvelle.
Vous veniez cependant tout échauffé d’amour.

D. César.

J’ai voulu, pour le voir, attendre ton retour.

Carlin.

Et qu’avez-vous donc fait depuis votre arrivée ?

D. César.

J’ai rêvé.

Carlin.

J’ai rêvé.La douceur est assez bien trouvée.
En auberge ! Personne en ce lieu de repos
Ne sait que vous soyez Dom César d’Avalos.

D. César.

La mort de Dom Fadrique à me cacher m’engage.
Personne dans Madrid ne connoît mon visage ;
Et quelque fort appui qu’on m’y doive prêter,
Si j’avois dit mon nom, on pourroit m’arrêter.
Avant que je l’avoue, il est bon que mon pere
Ait avec la partie accommodé l’affaire.
En tous cas, force amis doivent agir pour moi,
S’il faut solliciter ma grace auprès du roi.

Carlin.

Mais Enrique est ici qui peut vous reconnoître,
Vous êtes mal ensemble, & s’il vous voit paroître…

D. César.

Enrique a de l’honneur, je n’en dois craindre rien,
Quand il sauroit l’affaire, il en useroit bien,
L’estime est entre nous plus forte que la haine.
J’avois crû ce matin ma précaution vaine ;
Un homme qui de près m’est venu regarder,
Surpris de ma rencontre, a voulu m’aborder.
J’ai reculé pour être en état de défense,
S’il prétendoit user de quelque violence ;
Et ne comprenant rien à tout ce qu’il m’a dit,
J’ai cessé d’écouter.