Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 5, 1748.djvu/127

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Carlin.

Puisque avec Béatrix…Au premier entretien,
Je saurai l’un & l’autre, ils ne tiennent à rien.
Mais voici cette sœur dont la beauté vous pique.



Scène IV.

ISABELLE, D. CÉSAR, BÉATRIX, CARLIN.
Isabelle.

Comment avecque vous faut-il que je m’explique,
Mon Frere ? Je rougis lorsque je me souviens,
Et de ma complaisance, & de nos entretiens.
Quelles plaintes de vous n’ai-je pas lieu de faire ?
Car vous saviez déja que vous étiez mon frere,
Et n’avez si long-temps caché votre retour,
Que pour voir sur mon cœur ce que pourroit l’amour.

D. César.

Oui, ma sœur, il est vrai, je vous avois connue.
J’appris qui vous étiez vous voyant dans la rue,
Et sans savoir pourquoi je ne vous parlois pas,
La curiosité me fit suivre vos pas.
C’est par-là que d’abord avecque tant de zéle,
Contre un lâche importun je pris votre querelle ;
Je vous cachai mon nom, pour avoir la douceur
De connoître à loisir le fond de votre cœur.
Plus vous vous expliquiez sur la reconnoissance,
Plus j’aimois à jouir de votre complaisance ;
Et pour pouvoir goûter plus long-temps avec vous
Les charmes innocens d’un commerce si doux,
Croyant qu’un autre ciel, l’air de la mer, & l’âge,
Auroient assez changé les traits de mon visage,
Rencontrant par malheur Béatrix sur mes pas,
J’ai feint d’en être crû ce que je n’étois pas ;