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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 5, 1748.djvu/197

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Pourrai-je m’applaudir de ses dédains vaincus,
Quand son ambition voulant se satisfaire,
Aura plutôt en moi, pour finir mon tourment,
Regardé le Dieu que l’Amant ?
Comme Prince et Mortel, dans mon amour extrême,
Je voudrois lui pouvoir faire agréer mes vœux,
Obtenir son cœur d’elle-même,
Et la voir sensible à mes feux,
Sans qu’elle sût que c’est un Dieu qui l’aime.

palémon

Si comme dans Borée il vous a plu choisir
Le sang que vous feignez vous avoir donné l’être,
Vous l’imitiez dans le brûlant désir
Que l’amour autrefois dans son âme fit naître,
Vous n’auriez pas le goût si différent du sien.
Charmé de la belle Orithie,
Il fit l’Amant soumis, en prit le doux maintien,
Et d’abord les soupirs furent de la partie ;
Mais voyant qu’auprès d’elle ils ne servoient de rien,
Sans tenir au respect la flamme assujettie,
Il employa la force, et s’en trouva fort bien.

glaucus

Ah, ne me parle point de suivre son exemple.
Moi, tâcher d’être heureux par un enlèvement !

palémon

Soupirez donc toujours, la matière est bien ample,
Quand un rival en est le fondement.
Silla, vous le savez, regrette Mélicerte ;
Pour ce Prince Thébain son cœur est enflammé.

glaucus

Oui, je sais qu’il en est aimé,
Et c’est la cause de ma perte.
Mais enfin tout à coup disparu de ces lieux,
Sans l’avoir préparée aux chagrins de l’absence,
Par ce départ injurieux
Il semble qu’à mon espérance
Il abandonne un bien si précieux.