Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 5, 1748.djvu/201

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glaucus

Non, vos conseils sont superflus.
Mélisse, il faut que j’aime, et le Destin l’ordonne ;
Mais lorsque tout mon cœur à Silla s’abandonne,
Qu’ai-je en moi qui me doive attirer ses refus ?
Mon rival vaut-il tant qu’elle me le préfère,
Quand il s’agit de choisir un époux ?
Et suis-je fait d’un air…

célie

Non, Seigneur, au contraire,
Air, taille, mine, port, tout est brillant en vous ;
Et vous auriez le cœur de quelqu’une d’entre nous,
Si quelqu’une de nous avoit l’heur de vous plaire.

mélisse

Qui cherche à prévenir d’un air si gracieux,
Doit se sentir d’humeur à ne se point défendre.

célie

Sans doute, je tiendrois le parti glorieux,
Car comme vous je ne veux pas le prendre
Sur le ton fier et sérieux ;
Mais soit dit sans blesser le pouvoir de vos yeux,
Qui vous donnent droit de prétendre
Jusqu’à la tendresse des Dieux,
Celle qu’on voit qui se défend le mieux,
Est quelquefois la plus prête à se rendre.

palémon

Célie est sans façon, et je l’aime par là.

célie

À quoi peut servir la grimace ?

glaucus

Quoi, toujours Mélicerte est aimé de Silla,
Quoique par son absence il m’ait quitté la place ?
Il l’ose abandonner, sans qu’on sache en quel lieu
Son ingratitude l’entraîne,
Point d’excuse, aucun adieu
Et les soupirs d’un Prince, et peut-être d’un Dieu,
Ne pourront contre lui révolter l’inhumaine ?
La constance est sans doute un peu hors de saison.