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Scène IV


CIRCÉ, DORINE.


dorine

Ainsi pour lui vos flammes sont éteintes,
Et ces tendres ardeurs dont il vous fut si doux
De lui voir partager les sensibles atteintes,
N’ont plus aucun pouvoir sur votre cœur jaloux ?
Il est tout occupé de la juste colère,
Que du Prince de Thrace allument les refus

circé

Il devroit l’être au moins, tant j’ai l’esprit confus
De l’affront que l’Ingrat à ma flamme ose faire ;
Mais en vain la vengeance a de quoi me charmer.
En vain elle me porte à résoudre sa peine ;
Malgré ce que je sais que je lui dois de haine,
Un fatal Ascendant me force de l’aimer,
Et plus à le punir je me veux animer,
Plus je sens que je cède à l’amour qui m’entraîne.
Il n’en faut point douter, l’implacable Vénus
Est toujours sensible à l’outrage.
Ce fut par le Soleil, par son seul témoignage,
Que ses feux avec Mars aux Dieux furent connus,
Et ce cruel amour qu’elle a mis dans mon âme
La venge sur moi de l’affront
Dont mon Père autrefois, en découvrant sa flamme,
Laissa la tache sur son front.

dorine

Vous devez espérer…

circé

Que veux-tu que j’espère ?
Malgré ce que ma gloire y couroit de hasard,
Pour m’acquérir le cœur d’un Téméraire,
Ai-je rien épargné des secrets de mon Art ;