Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 5, 1748.djvu/248

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Moi qui cent fois d’un seul regard
Ai gagné des plus fiers l’hommage volontaire ?
Ce dernier Charme encor dont je viens à tes yeux
De faire l’inutile épreuve,
N’est-il pas de ma honte une trop forte preuve ?
Qu’a-t-il fait, qu’a-t-il pu sur cet Audacieux ?
Silla toujours pour lui n’est-elle pas la même ?
N’est-elle pas toujours l’objet de son amour ?
Ah, c’est trop en souffrir ; dans ma fureur extrême
Ne pouvant obtenir qu’il m’aime,
Satisfaisons ma gloire, en le privant du jour.
Les Charmes contre lui n’ont qu’une vaine amorce ;
Mais au moins ce doit m’être un bonheur assez doux,
Que s’il me plaît d’en croire mon courroux,
Il est des poisons dont la force
Donnera plein triomphe à mes transports jaloux.
Éteignons une ardeur fatale,
Qui de mon cœur troublant la paix…



Scène V


CIRCÉ, FLORISE, DORINE.


florise

Silla, pour vous parler, entre dans le Palais.

circé

Silla ? Mon sang s’émeut au nom de ma Rivale.
Qu’on l’amène ; il faut voir ces dangereux attraits
Qui rendent ma puissance à la sienne inégale.
S’il est vrai que toujours le Prince dédaigné
Ait servi de victime à son humeur altière,
Je veux pour lui la rendre encor plus fière,
Et croirai dans ma perte avoir assez gagné,
S’il n’a pas sur ma flamme une victoire entière.