Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 5, 1748.djvu/295

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Tout entier à Silla, vous avez dédaigné
D’adoucir, de flatter ma peine.
Contre vous à mon tour toute entière à ma haine,
J’ai suivi ses transports, et n’ai rien épargné
Pour rendre ma vengeance et sensible et certaine.
Mes vœux ont réussi, vous souffrez, et pour moi
C’est un plaisir que rien n’égale.
Allez aux pieds de ma Rivale
Par de nouveaux serments signaler votre foi.
Un temps si long perdu loin d’elle
Ne se peut réparer que par un prompt retour.
Courez, on vous attend, faites bien votre cour,
Et recevez le prix de cette ardeur fidèle
Qui vous a fait dédaigner mon amour.


glaucus

D’un outrage forcé me faites-vous complice,
Et connoissant l’Être Divin,
Aurez-vous toujours l’injustice
De m’imputer ce qu’a fait le Destin ?
Quand d’Europe, d’Io, de Sémélé, d’Alcmène,
L’amoureux Jupiter a chéri les appas,
Dépendoit-il de lui de ne soupirer pas,
Et pour toucher leurs cœurs eût-il pris tant de peine
Si le sien libre à s’enflammer
Eût pu se défendre d’aimer ?
C’est de cet Ascendant la fatale puissance
Qui vers Silla m’entraîne malgré moi.
Obéir au Destin qui m’en fait une loi,
Est-ce avoir oublié ce que votre naissance
Vous pouvoit faire attendre de ma foi ?
Si j’ai par mes refus excité la colère
Qui contre ce que j’aime arme votre rigueur,
Songez que ce n’est point un crime volontaire,
Et que si je pouvois disposer de mon cœur,
Ce cœur mettroit tous ses soins à vous plaire.

circé

Non, Silla les a mérités ;
Et comme la raison éclaire enfin mon âme,