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ACTE II



Scène premiere.


OLYMPE, MÉLISSE.
Mélisse.

Ainsi par une vue au chevalier fatale,
La comtesse en ces lieux trouve en vous sa rivale ?

Olympe.

Il est vrai, c’est ici que j’ai pris, malgré moi,
Ce qui vers le marquis a fait pencher ma foi.
À le voir, à l’entendre, à toute heure exposée,
J’ai cru ne risquer rien, & me suis abusée ;
Son esprit engageant, son air plein de douceur,
Sa mine, tout pour lui m’a demandé mon cœur.
Pour peu qu’on se hazarde auprès d’un vrai mérite,
Que la raison est foible, & que ce cœur va vîte !
D’un tendre mouvement l’appas flatteur & doux
M’a fait voir la comtesse avec des yeux jaloux.
S’il lui parle un moment, je m’en sens inquiéte ;
Et trop pleine du trouble où ce chagrin me jette,
Dans ce Bois frais & sombre où je la viens trouver,
Je la cherche à pas lents, & n’aime qu’à rêver.

Mélisse.

Mais vous n’ignorez pas qu’il aime la comtesse ?

Olympe.

Nous pouvons l’une & l’autre avoir même foiblesse ;
J’aimois le chevalier avant ce changement,
Du moins je le souffrois en qualité d’amant.
Cependant le marquis fait balancer mon ame,
Et quoiqu’à la comtesse il ait montré sa flamme,