Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 5, 1748.djvu/482

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Vous savez là-dessus quelle est mon innocence,
Et ma gloire avec vous étant en assurance,
Ce que mes ennemis en voudront présumer,
Quoi qu’ose leur fureur, ne sauroit m’alarmer.
Leur imposture enfin se verra découverte ;
Et tout méchans qu’ils sont, s’ils résolvent ma perte,
Assemblés pour l’arrêt qui doit me condamner,
Ils trembleront peut-être avant que le donner.

La Duchesse.

Si l’éclat qu’au palais mon hymen vous fit faire
Me faisoit craindre seul un arrêt trop sévere,
Je pourrois de ce crime affranchir votre foi,
En déclarant l’amour que vous eûtes pour moi.
Mais des Témoins ouïs sur ce qu’avec l’Irlande
On veut que vous ayez…

Le Comte.

On veut que vous ayez…La faute n’est pas grande,
Et pourvû que nos feux à la reine cachés
Laissent à mes jours seuls mes malheurs attachés…

La Duchesse.

Quoi, vous craignez l’éclat de nos flammes secrettes,
Ce péril vous étonne, & c’est vous qui le faites ?
La reine qui se rend sans rien examiner,
Si vous y consentez, vous veut tout pardonner.
C’est vous, qui refusant…

Le Comte.

C’est vous, qui refusant…N’en parlons plus, Madame,
Qui reçoit un pardon, souffre un soupçon infame ;
Et j’ai le cœur trop haut pour pouvoir m’abaisser
À l’indigne priere où l’on me veut forcer.

La Duchesse.

Ah, si de quelque espoir je puis flatter ma peine,
Je vois bien qu’il le faut mettre tout en la reine.
Par de nouveaux efforts je veux encor pour vous
Tâcher, malgré vous-même, à vaincre son courroux.