Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 5, 1748.djvu/490

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Qu’il n’a, s’il veut finir mes déplorables jours,
Qu’à souffrir que des siens on arrête le cours.
Presse, prie, offre tout pour fléchir son courage.
Enfin si pour ta reine un vrai zéle t’engage,
Par crainte, par amour, par pitié de mon sort,
Obtient qu’il se pardonne, & l’arrache à la mort,
L’empêchant de périr, tu m’auras bien servie.
Je ne te dis plus rien, il y va de ma vie,
Ne perds point de temps, cours, & me laisse écouter
Ce que pour sa défense un ami vient tenter.



Scène III.

ÉLISABETH, LE COMTE DE SALSBURY.
Salsbury.

Madame, pardonnez à ma douleur extrême,
Si paroissant ici pour un autre moi-même,
Tremblant, saisi d’effroi, pour vous, pour vos états,
J’ose vous conjurer de ne vous perdre pas.
Je n’examine point quel peut être le crime ;
Mais si l’arrêt donné vous semble légitime,
Vous le paroîtra-t-il quand vous daignerez voir,
Par un funeste coup, quelle tête il fait cheoir ?
C’est ce fameux héros dont cent fois la victoire
Par les plus grands exploits a consacré la gloire,
Dont partout le destin fut si noble & si beau,
Qu’on livre entre les mains d’un infame bourreau.
Après qu’à sa valeur, que chacun idolâtre,
L’Univers avec pompe a servi de théatre,
Pourrez-vous consentir qu’un échafaud dressé,
Montre à tous de quel prix il est récompensé ?
Quand je viens vous marquer son mérite & sa peine,
Ce n’est point seulement l’amitié qui m’améne,