Aller au contenu

Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 5, 1748.djvu/559

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


ACTE IV



Scène I.

LÉON, ROGER.
Léon.

Quoi, pour vous obliger à cette complaisance,
Hyppalque, il a fallu vous faire violence,
Et pour fuir de ces lieux, & partir sans me voir,
Vous aviez des raisons que je ne puis savoir ?

Roger.

Goûtez, Seigneur, goûtez votre heureuse fortune,
Ma présence ne peut que vous être importune ;
Et je dois à jamais vous laisser ignorer
Les funestes chagrins, qui me vont dévorer.
Vous m’aimez ; j’évitois, en partant sans rien dire,
De vous voir inquiet des maux dont je soupire ;
Et si je n’eusse appris qu’assuré de ma foi,
Vous vouliez d’un secret vous reposer sur moi,
Je vous eusse épargné le souci que vous donne
Le fatal désespoir où mon cœur s’abandonne,
J’allois du Ciel ailleurs implorer la pitié.

Léon.

Cet injuste dessein blesse notre amitié.
S’il n’est point de remede au mal qui vous accable,
Du moins quand on est plaint, on est moins misérable ;
Et vous ne doutez pas que Léon tout à vous,
Du sort qui vous poursuit ne ressente les coups.
Mais aussi je voudrois vous voir un peu de joie
Lors que du ciel sur moi la faveur se déploie.