Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/112

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de son nom. Bientôt il visita les grandes ruines de Thèbes. Des caractères égyptiens48, tracés sur des monuments d’une structure colossale, attestaient encore l’opulence de cette antique cité. Un vieux prêtre, qu’il pria de lui expliquer ces inscriptions, exposait "que la ville avait contenu jadis sept cent mille hommes en âge de faire la guerre ; qu’à leur tête le roi Rhamsès49 y avait conquis la Libye, l’Éthiopie, la Médie, la Perse, la Bactriane, la Scythie ; que tout le pays qu’habitent les Syriens, les Arméniens, et, en continuant par la Cappadoce, tout ce qui s’étend de la mer de Bithynie à celle de Lycie, avait appartenu à son empire." On lisait, sur ces mêmes inscriptions, le détail des tributs imposés à tant de peuples, le poids d’or et d’argent, la quantité d’armes et de chevaux, les offrandes pour les temples, en parfums et en ivoire, le blé et les autres provisions que chaque nation devait fournir : tributs comparables par leur grandeur à ceux que lèvent de nos jours la monarchie des Parthes ou la puissance romaine.

48. Les hiéroglyphes.
49 Le même que Sésostris.

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D’autres merveilles attirèrent encore les regards de Germanicus : il vit la statue en pierre de Memnon, qui, frappée des rayons du soleil, rend le son d’une voix humaine ; et ces pyramides, semblables à des montagnes, qu’élevèrent, au milieu de sables mouvants et presque inaccessibles, l’opulence et l’émulation des rois ; et ces lacs50 creusés pour recevoir les eaux surabondantes du Nil débordé, et ailleurs ce même fleuve pressé entre ses rives et coulant dans un lit dont nul homme n’a jamais pu sonder la profondeur. De là il se rendit à Éléphantine et à Syène, où furent jadis les barrières de l’empire romain, reculées maintenant jusqu’à la mer Rouge51.

50. Le lac Moeris.
51. Allusion aux conquêtes de Trajan en Arabie, en Mésopotamie et en Assyrie. Les anciens étendaient la dénomination de mer Rouge jusqu’à l’Océan indien.

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Pendant que Germanicus employait l’été à parcourir les provinces, Drusus se fit honneur par l’adresse avec laquelle il sut diviser les Germains, et susciter à Maroboduus, déjà si ébranlé, une guerre qui achevât de l’abattre. Il y avait parmi les Gothons un jeune homme d’une haute naissance, nommé Catualda, jadis obligé de fuir devant la puissance de Maroboduus, et que les malheurs de son ennemi enhardirent à se venger. Il entre en force chez les Marcomans ;