Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/287

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encouru la disgrâce de son père et de céder aux haines d’une marâtre, se retire chez son oncle. Reçu par lui comme un fils, et traité avec la bonté la plus généreuse, il excite à la révolte les grands du royaume ; intrigue ignorée de Mithridate, qui le comblait chaque jour de nouveaux bienfaits.

Rhadamiste, fils du roi d’Ibérie convoite l’Arménie

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Retourné chez son père sous prétexte d’une réconciliation, il lui annonce que tout ce qu’on pouvait attendre de la ruse est préparé, que c’est aux armes à faire le reste. Pharasmane invente alors un sujet de rupture. Il suppose qu’étant en guerre avec le roi d’Albanie, et appelant les Romains à son secours, il avait trouvé dans son frère un obstacle à ses desseins, injure dont il prétend se venger par la ruine de Mithridate. En même temps il donne à son fils des troupes nombreuses. Celui-ci, par une soudaine irruption, épouvante l’ennemi, le chasse de la campagne, et le pousse jusque dans le fort de Gornéas, défendu à la fois par sa position et par une garnison romaine sous les ordres du préfet Célius Pollio et du centurion Caspérius. Rien de plus inconnu aux barbares que l’usage des machines et fart des sièges, rien au contraire où nous excellions davantage. Aussi Rhadamiste, après avoir tenté plusieurs attaques sans succès ou avec perte, investit la place, et achète de l’avarice du préfet ce qu’il n’attend plus de la force. En vain Caspérius demandait avec instance qu’un roi allié, que le royaume d’Arménie, présent du peuple romain, ne fussent pas sacrifiés au crime et vendus pour de l’or. Pollion alléguait le grand nombre des ennemis, Rhadamiste les ordres de son père. Enfin le centurion convient d’une trêve, et part dans l’intention de décider Pharasmane à cesser la guerre, ou d’instruire le gouverneur de Syrie Ummidius Quadratus de l’état de l’Arménie.

Intervention des Romains

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Le préfet, délivré ainsi d’un surveillant importun, presse Mithridate de traiter sans retard. Il lui rappelle les nœuds sacrés de la fraternité, l’âge plus avancé de Pharasmane, les autres liens qui l’unissent à ce prince comme époux de sa fille et beau-père de Rhadamiste. Il fait valoir la modération des Ibériens, qui ne refusent point la paix malgré leurs succès, la perfidie trop connue des Arméniens, le peu de ressources qu’offre un château dépourvu de vivres, enfin les avantages d’une capitulation qui épargnerait le sang. Mithridate n’osait se fier au préfet, qui avait séduit une de ses concubines, et qu’on croyait, pour de l’or, prêt à toutes les bassesses. Pendant qu’il hésitait, Caspérius arrive chez Pharasmane