Aller au contenu

Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/316

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

habits de deuil, ne s’occupa que de sa douleur ; constance impunie sous Claude, et qui fut après lui un titre de gloire.

La même année vit plusieurs accusations, entre autres celle de P. Celer, que dénonçait la province d’Asie. Néron, ne pouvant l’absoudre, traîna le procès en longueur jusqu’à ce que l’accusé mourût de vieillesse. Céler avait empoisonné, comme je l’ai déjà dit, le proconsul Silanus, et la grandeur de ce crime couvrait tous les autres. Cossutianus Capito était poursuivi par les Ciliciens comme un infâme chargé de souillures, et dont l’audace s’était arrogé dans la province les mêmes droits qu’elle avait usurpés à Rome. Lassé par la persévérance des accusateurs, il renonça enfin à se défendre, et fut condamné d’après la loi sur la concussion. Éprius Marcellus, attaqué en restitution par les Lyciens, dut à la brigue un succès plus heureux : son crédit fut assez fort pour faire exiler quelques-uns des accusateurs, sous prétexte qu’ils avaient mis en péril un innocent.

An 58

A l’extérieur

Les Parthes et Corbulon

34

Néron, dans son troisième consulat, eut pour collègue Valérius Messala, dont quelques vieillards se ressouvenaient encore d’avoir vu le bisaïeul, l’orateur Corvinus, exercer cette magistrature avec Auguste, trisaïeul de Néron. L’éclat de cette noble famille fut accru par le don qu’on offrit à Messala de cinq cent mille sesterces par an, pour l’aider à soutenir son honorable pauvreté. Aurélius Cotta et Hatérius Antoninus reçurent aussi du prince un revenu annuel, quoiqu’ils eussent dissipé dans les prodigalités du luxe les richesses de leurs pères. Au commencement de cette année, la guerre entre les Parthes et les Romains pour la possession de l’Arménie, mollement engagée et traînée jusqu’alors en longueur, éclata vivement. Vologèse ne voulait pas que son frère Tiridate fût privé d’un trône qu’il tenait de ses mains, ni qu’il le possédât comme le don d’une puissance étrangère. De son côté, Corbulon croyait digne de la grandeur romaine de recouvrer les conquêtes de Lucullus et de Pompée. Enfin, la foi indécise des Arméniens appelait tour à tour les deux partis. Toutefois ce peuple, par la position des lieux, ainsi que par les mœurs, se rapprochait des Parthes ; et, confondu avec eux par les mariages, ignorant d’ailleurs la liberté, c’est d’eux qu’une préférence naturelle le portait à recevoir des maîtres.

Réorganisation des légions romaines

35

Mais la perfidie de l’ennemi donna moins d’embarras à Corbulon que la lâcheté de ses troupes. Amollies par une longue paix, les légions appelées de Syrie supportaient impatiemment