Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/489

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le combat et de fuir aussitôt, afin d’offrir une amorce à la témérité de l’ennemi, jusqu’à ce que l’embuscade se levât pour l’écraser. Ce plan fut découvert aux généraux d Othon. Suétonius se chargea de guider l’infanterie, Celsus la cavalerie. Le détachement de la treizième légion, quatre cohortes auxiliaires, cinq cents chevaux, furent placés à la gauche ; trois cohortes prétoriennes en ordre profond occupèrent la chaussée ; à la droite marchait la première légion avec deux cohortes auxiliaires et cinq cents autres chevaux. Enfin mille cavaliers, tant auxiliaires que prétoriens, venaient en dernière ligne pour achever la victoire, ou rétablir au besoin le combat.

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Avant que les deux armées fussent aux mains, la cavalerie Vitellienne tourna le dos. Prévenu du stratagème, Celsus retint l’impétuosité des siens. Bientôt l’infanterie sort inconsidérément de ses bois, et en poursuivant trop loin Celsus qui se retirait au petit pas, elle se jette elle-même dans une embuscade. Sur ses flancs elle trouvait les cohortes ; les troupes légionnaires étaient en face ; et la cavalerie, s’avançant rapidement à droite et à gauche, l’avait déjà tournée par derrière. Suétonius ne fit pas donner aussitôt ses gens de pied. Aimant à prendre son temps, et préférant une marche prudemment régulière aux plus belles chances de succès, il fit combler les fossés et découvrir la campagne afin de pouvoir y déployer ses lignes. Il était assez tôt, selon lui, pour commencer à vaincre, quand on s’était assuré de n’être pas vaincu. Ce délai permit aux Vitelliens de se réfugier dans des vignes dont les rameaux attachés d’un arbre à l’autre embarrassaient le terrain, et près desquelles était un petit bois. De là hasardant une nouvelle attaque, ils tuèrent les cavaliers prétoriens que leur courage exposa le plus. Le roi Épiphane8 fut blessé en faisant pour Othon des prodiges de valeur.

8. Épiphane fils d’Antiochus roi de Comagène.

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Alors l’infanterie othonienne se montra tout à coup. Elle écrase le gros des ennemis et met en fuite les troupes de réserve à mesure qu’elles arrivent. Car Cécina, au lieu de faire agir à la fois toutes ses cohortes, les avait appelées successivement, et cette faute mit le comble au désordre, les fuyards entraînant dans leur déroute ces corps séparés et qui nulle part ne se trouvaient en force. Elle excita même une sédition dans le camp : irrités qu’on ne les fît pas marcher en masse,