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Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/601

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tout du haut des murs, s’élancent par toutes les portes à la fois. En ce moment, Civilis fut terrassé par la chute de son cheval, et l’on ne saurait croire combien le bruit répandu dans les deux partis qu’il était blessé ou mort inspira d’effroi à son armée et d’ardeur à la nôtre.

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Vocula, négligeant de poursuivre un ennemi qui fuyait, se mit à renforcer de tours et de palissades le camp de Vétéra, comme s’il était menacé d’un second siège, et fut à bon droit suspect (tant il gâtait souvent sa victoire) de préférer la guerre à la paix. Rien ne fatiguait nos troupes autant que le défaut de vivres. Les équipages des légions, avec ce qu’il y avait de moins propre au combat, furent envoyés à Novésium pour en amener des grains par la route de terre, car les ennemis étaient maîtres du fleuve. Le premier convoi alla et revint tranquillement, Civilis n’étant pas encore rétabli de sa chute. Quand ce chef apprit qu’un second était parti pour Novésium, escorté par des cohortes qui marchaient comme en pleine paix, les drapeaux presque seuls, les armes sur les voitures, chacun errant à sa fantaisie, il l’assaillit en bon ordre, après avoir fait occuper d’avance les ponts et les défilés. On combattit sur une longue colonne et avec un succès douteux, jusqu’à ce que la nuit fît cesser l’action. Les cohortes gagnèrent Gelduba, où le camp subsistait toujours ; gardé par un détachement qu’on y avait laissé. On n’ignorait pas les périls qui menaçaient le retour, quand une charge pesante embarrasserait des troupes déjà intimidées. Vocula prend dans la cinquième et la quinzième légion, qui avaient essuyé le siège de Vétéra, un renfort de mille hommes, esprits indomptés et violemment aigris contre les chefs. Il en partit plus qu’il n’en avait commandé. Ils criaient hautement, pendant la marche, qu’ils n’endureraient plus la faim et la perfidie des généraux. Ceux qui étaient restés se plaignaient de leur côté qu’on les sacrifiait, en séparant d’eux une partie des légionnaires. De là une double sédition, les uns rappelant Vocula, les autres refusant de revenir dans le camp.

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Cependant Civilis remet le siège devant Vétéra : Vocula se rend à Gelduba, puis à Novésium. Civilis prend Gelduba et livre, près de Novésium, un combat de cavalerie où il remporte l’avantage. Pour nos soldats, les succès et les revers les animaient également à la perte des généraux. Les légions, accrues des mille hommes de la cinquième et de la quinzième, demandent le don militaire ; elles savaient que