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des sacs et des exterminations, tendaient à l’apaisement universel, demandaient aux armes la réalisation d’un idéal pacifique, la réunion de tous les hommes dans le même bercail, sous la houlette d’un pasteur magnanime et triomphant. Cette ambition des rois, des princes, des chefs militaires, les peuples, aujourd’hui, l’ont reprise à leur compte. Justement parcimonieux de leur vie et de leur fortune, ils demandent, pour trancher leurs différends et juger les procès de nation à nation, un tribunal plus équitable, une justice plus humaine que le hasard des combats. Au patriotisme étroit, agressif et borné des époques lointaines succède le patriotisme intelligent, respectueux du droit universel, qui n’estime pas absolument nécessaire de tuer ou de mourir pour vider une querelle et revendiquer son bien. Le pacifisme a conquis les plus nobles intelligences, ému les cœurs d’un zèle fraternel. La Conférence de La Haye, où savants, hommes d’État, légistes et docteurs ont préparé le Code pacifique, la législation qui mettra fin aux victoires sanglantes, aux entreprises meurtrières, marque une étape glorieuse de l’Humanité.

Le siècle s’est mis en marche vers la terre promise, vers la Jérusalem que célébrait déjà le poète d’Israël quand, pour ses frères et ses proches, il implorait les grâces de la paix.

La Paix ! C’est elle que, depuis une semaine, en face de la mer divine, couleur de perle et d’or, la mer qu’Henri Heine a chantée ; c’est elle dans ces fêtes de l’art et de l’esprit qui font d’Ostende une capitale de l’Europe, c’est elle que les orateurs acclament et préconisent devant un auditoire où se mêle, comme dans un parterre de rois, tout ce que la terre a de plus charmant et de plus rare : le savoir et la grâce, la compréhension et la beauté[1].

La Paix ! D’autres vous ont déduit les motifs politiques, les raisons économiques de l’arbitrage demandé. Cherchons à travers les poètes ce que les siècles ont mis d’élan et de confiance, l’appel immémorial des races et des tribus vers la Déesse protectrice.

  1. Cette conférence a été donnée le 7 août 1908, pendant la Semaine de la Paix, organisée au Kursaal d’Ostende, par les soins de M. Edmond Picard.