Page:Taillasson - Observations sur quelques grands peintres, 1807.djvu/43

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et le degré de lumière qu’ils doivent avoir dans la place qu’ils occupent.

Après avoir admiré un aussi beau tableau, et toutes les ressources de l’art pour charmer la vue et imiter la nature, si l’on se demande quel en est le sujet ; si l’on se représente ce que l’artiste a dû peindre ; alors, dans un ensemble harmonieux pour les yeux, que de dissonances pour la raison ! que de vérités qui deviennent des mensonges ! Quoi de plus ridicule d’abord, que de supposer que toute la pompe et la richesse asiatique soient étalées aux noces d’un petit bourgeois d’une petite ville de Galilée ! Quelle invraisemblance dans l’expression ! Le vin manque au milieu d’un festin somptueux : tout à coup, par le pouvoir d’un inconnu, l’eau y produit l’abondance du vin : ah ! combien de mouvemens tumultueux, combien de différentes et de vives expressions un pareil prodige devoit faire naître ! Dans le tableau de Paul Véronèse, il n’y a pas plus de mouvement que dans un repas ordinaire ; les musiciens continuent leurs concerts, l’assemblée les écoute ; on se fait les yeux doux, on joue avec le petit chien, et ce vin miraculeux, versé à la ronde, est bu comme le vin accoutumé. Peut-on imaginer rien de plus