Page:Taine - Carnets de voyage, 1897.djvu/25

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Les paysans ont tous assez de terre pour faire leur provision de pommes de terre, un cheval ou un mulet, au moins un âne. Ils travaillent à la sucrerie de septembre à janvier ; les paysans aisés eux-mêmes viennent travailler. Ils sont réguliers, faciles à conduire, de sang-froid pour manier les machines. La machine a besoin de l’ouvrier du Nord et non de l’improvisateur fantaisiste du Midi.

La vie est sévère pour le jeune directeur, intelligent, joli garçon, décidé. Toute la journée, des cuves à mélasse, des marchés, des faces couleur de navet, des pieds nus qui pataugent entre les machines, et le soir, le tête-à-tête avec ses quatre murs, dans une maison de briques, avec un jardin de six pieds. Il faut se marier, avoir des enfants dans ce pays-là.

Point de plaisirs fins pour les jeunes gens du monde. Ils vont là où le vieux Caton envoyait les jeunes Romains. Arrivés à un certain âge, le père s’ennuie de les voir oisifs et les marie : on choisit la fille riche et bien apparentée, le