Page:Taine - Carnets de voyage, 1897.djvu/43

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courts ; ils ont l’air tassés dans une cave. Mais il y a déjà de belles têtes énergiques et nobles, et quel grand cœur tendre que celui qui a trouvé l’expression et la pose de la Vierge !

Trois autres sujets, avec quantité de figures ; cela fait monument ; il y a des colonnes, des niches à coquilles, une architecture décorative ; toutes les marques de la Renaissance. — Tête charmante de la femme qui foule le dragon, en face de la fenêtre. — Mais, ce qui m’a frappé le plus, c’est la Vierge et saint Joseph, retrouvant Jésus parmi les docteurs. Saint Joseph est le plus vif et le plus fin des paysans italiens ; la Vierge a une expression de jeune fille mignonne et pourtant décidée ; le couple est charmant et les poses sont prises au vol. Le petit Jésus est un bambino un peu gras, à grosses joues ; cette sincérité de l’art qui ignore la règle, le convenu et prend la vérité sur le vif, fait un plaisir extrême ; ces gens inventaient tout, ils ont vécu ; probablement une famille, une sorte d’école tout entière a déposé, imprimé là toute sa pensée, toute son âme. — Les docteurs, habillés à la façon du XVIe siècle, sont