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12 PRÉFACE

forme de dépense. — En second lieu, si toute la force en exercice pouvait à la longue se convertir en force disponible, si la nature ou l’arrangement des derniers éléments mobiles étaient tels que la transformation des effets en effets équivalents, mais différents, dût un jour s’arrêter partout, cela serait déjà fait ; or cela n’est pas fait. Il y a donc dans l’arrangement ou dans la nature des derniers éléments mobiles quelque par- ticularité ou circonstance qui empêche l’équilibre universel et final de s’établir. Selon Herbert Spencer, pour l’empêcher de s’étabhr, il suffirait d’une diffé- rence initiale quelconque, inhérente ou adventice, aussi petite que l’on voudra, introduite ou innée dans les éléments d’ailleurs aussi homogènes que l’on vou- dra. En tout cas, quelle que soit la circonstance ou particularité, il en faut une. — Voilà donc deux con- ditions que doivent remplir les derniers éléments mo- biles. Si la première n’était pas remplie, la plus haute loi mécanique serait fausse. Si la seconde n’était pas remplie, le branle que cette loi imprime aux choses et que nous constatons en fait serait arrêté aujour- d’hui. Or, à ce titre, on peut considérer les deux con- ditions comme des moyens, et leur commun résultat comme un but, comme le but de la nature exprimé par une loi suprême. A cette loi se rattacheraient toutes les autres, soit comme conditions préalables, soit comme conséquences ultérieures, et ce but serait la persis- tance de l’énergie à travers la rénovation des effets. Dans ces sortes de spéculations, il y a toujours une part notable de conjecture ; on est tenu, lorsqu’on y est conduit, d’indiquer à chaque pas le degré de cer-