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OBJET ET MÉRITES DU SYSTÈME


360[1]. Du même coup, et par un contre-coup merveilleux, l’ancien taillable, notamment le paysan propriétaire, le petit cultivateur « indéfendu », le privilégié à rebours, le souffre-douleur de la monarchie, est déchargé des trois quarts de sa charge immémoriale[2]. D’abord, par l’abolition de la dîme et des droits féodaux, il reprend un quart de son revenu net, le quart qu’il payait au seigneur et au clergé ; ensuite, par l’application de l’impôt direct à toutes les terres et à toutes les personnes, sa quote-part est réduite de moitié. Avant 1789, sur 100 francs de revenu net, il en versait 14 au seigneur, 14 au clergé, 53 à l’État, et n’en gardait que 18 ou 19 pour lui-même ; depuis 1800, sur 100 francs de revenu net, il ne paye plus rien au clergé ni au seigneur, il ne paye guère à l’État, au département et à la commune que 21 francs, et il garde 79 francs dans sa poche[3].

  1. Charles Nicolas, les Budgets de la France depuis le commencement du xixe siècle (par tableaux). — M. de Foville, la France économique, 356. — En l’an IX. le total des contributions directes est de 308 millions ; en l’an XI, de 360 ; en l’an XIII. de 376. — On estime à 1500 millions le total du revenu net de la propriété foncière en France vers 1800.
  2. C’est seulement à partir de 1816 qu’on peut démêler le total de chacune des quatre contributions directes (foncière, personnelle, mobilière, portes et fenêtres). En 1821. la foncière est de 265 millions, et les trois autres ensemble font 67 millions. Si l’on prend le chiffre de 1580 millions auquel l’administration évalue pour cette date le revenu foncier net de la France, on trouve que, sur ce revenu, la foncière prélève alors 16,77 pour 100, et que, jointe aux trois autres, elle prélève alors sur le même revenu 21 pour 100. — Au contraire, avant 1789, les cinq impôts directs correspondants, joints à la dîme et aux droits féodaux, prélevaient sur le revenu net foncier du taillable 81,71 pour 100. (Cf. l’Ancien Régime, tome II, 229, 230, 235 et suivantes.
  3. Ce chiffre est capital, et mesure la distance qui sépare l’an-