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XII
AVANT-PROPOS


auxquelles lui-même a contribué, toutes celles par lesquelles la science embrasse un morceau de plus en plus grand de l’univers, il les voyait contenant la même essence, s’unissant pour altérer la conception du monde, pour lui en substituer une autre, cohérente et logique dans les hautes têtes, puis trouble et déformée à mesure qu’elle descend lentement au sein des foules. — Il nous eût décrit cette descente, cette graduelle diffusion, la puissance grandissante de la nouvelle Idée, le ferment actif qu’elle renferme à la façon d’un dogme, d’un dogme bienfaisant ou pernicieux suivant les cervelles où il s’établit, capable d’armer les hommes et de les lancer en sauvages vers les destructions pures s’ils ne le comprennent pas tout entier, capable de les organiser à nouveau s’ils savent saisir son véritable sens. — Ses premiers effets ne sont que destructeurs, car, par le Darwinisme, par la psychologie expérimentale, par la physiologie cérébrale, par l’exégèse biblique, par l’étude comparée des sociétés sauvages et de leurs morales, la conception nouvelle ébranle d’abord l’idée religieuse qu’elle tend à remplacer ; même, chez les esprits novices et de demi-culture elle aboutit à la néga-