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L’ÉCOLE


partielles, avec tant de points pour sa valeur totale, et, d’après ces chiffres, il est classé à tel rang parmi ses camarades qui sont ses rivaux. Descendre dans l’échelle serait désavantageux et humiliant ; monter dans l’échelle sera utile et glorieux. Sous la poussée de ce motif, si fort en France, son principal objet est de monter, ou du moins de ne pas descendre : il emploie à cela toute sa force, il n’en dépense aucune parcelle à côté ni au delà, il ne s’accorde aucune diversion, il ne se permet aucune initiative ; sa curiosité contenue ne s’aventure pas hors du cercle tracé ; il n’absorbe que les matières enseignées et dans l’ordre où elles sont enseignées ; il s’en emplit, et à pleins bords, mais pour se déverser à l’examen, non pour retenir et garder à demeure ; il court risque de s’engorger, et, quand il se sera dégorgé, de rester creux. — Tel est le régime de nos écoles spéciales : ce sont des entreprises de jardinage systématique, énergique et prolongé ; l’État, jardinier en chef, agrée ou choisit des plants qu’il se charge de mener à bien, chacun en son espèce. À cet effet, il sépare les espèces et les range chacune à part sur une couche de terreau ; là, toute la journée, il bêche, sarcle, ratisse, arrose, ajoute engrais sur engrais, applique ses puissants appareils de chauffage, accélère la croissance et la maturation. Dans certaines couches, ses plants sont toute l’année sous cloche ; de cette façon, il les maintient dans une atmosphère artificielle et constante, il les contraint à s’imbiber plus largement des liquides nutritifs qu’il leur prodigue, à se gonfler, à s’hyper-