Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 3, 1909.djvu/56

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
42
LA RÉVOLUTION


français, par Cerutti, Considérations sur les intérêts du Tiers-État, par Rabaut-Saint-Étienne, Ma pétition, par Target, les Droits des États Généraux, par M. d’Antraigues, un peu plus tard la France libre, par Camille Desmoulins, d’autres encore, par centaines et par milliers[1], tous répétés et amplifiés dans les assemblées électorales ou les nouveaux citoyens viennent déclamer et s’échauffer[2]. Le cri unanime, universel et quotidien roule d’écho en écho jusque dans les casernes, les faubourgs, les marchés, les ateliers, les mansardes. Au mois de février 1789, Necker avoue « qu’il n’y a plus d’obéissance nulle part, et qu’on n’est pas même sûr des troupes ». Au mois de mai, les marchandes de poisson, puis les fruitières de la Halle, viennent recommander aux électeurs les intérêts du peuple et chanter des couplets en l’honneur du Tiers-État. Au mois de juin, les pamphlets sont dans toutes les mains ; « les laquais eux-mêmes les dévorent à la porte des hôtels ». Au mois de juillet, comme le roi signait un ordre, un valet patriote s’alarme et lit par-dessus son épaule. — Il ne faut pas se faire illusion ; ce n’est pas la bourgeoisie seulement qui prend parti contre les autorités légales et contre le régime établi, c’est le peuple entier, gens de métier, de boutique et de service, manœuvres de toute espèce et de tout degré, au-dessous du peuple la populace, vagabonds, traîneurs de rue,

  1. Voir à la Bibliothèque nationale le catalogue si long de ceux qui ont survécu.
  2. Malouet, I, 255. Bailly, I, 43 (9 et 19 mai). — Comte d’Hézecques, Souvenirs d’un page de Louis XVI, 293. — Besenval, I, 368.