Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/187

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on peut le considérer, il ne restera rien. La substance n’est donc pas quelque chose de réel, distinct et différent de ses qualités ; c’est par illusion qu’on se la représente comme une sorte de siège et d’appui sur lequel les qualités viennent se poser. Cette pierre n’est rien en dehors de la forme, de l’étendue, de la dureté, de la couleur, des propriétés physiques et chimiques qu’elle possède. Elle en est, non la collection, car ce mot semble indiquer un tout fabriqué de parties primitivement séparées, mais l’ensemble primitif, et les qualités ne sont que des parties de cet ensemble ultérieurement séparées. Maintenant l’axiome s’entend très-clairement. Toute qualité suppose une substance. Cela signifie : tout abstrait, c’est-à-dire toute partie, tout fragment, toute donnée extraite d’une donnée plus complexe suppose une donnée plus complexe. Tous voyez que le mot donnée plus complexe se trouve dans le sujet comme dans l’attribut de la phrase, qu’ainsi l’attribut ne fait qu’isoler ce qui est déjà dans ce sujet, et que par conséquent il n’y a là qu’une analyse. Ainsi, pour former l’axiome de substance, il suffit d’analyser les notions de qualité et de substance. Mais on aura ces notions dès qu’on pourra observer une qualité et une substance particulières, et en tirer par abstraction l’idée d’une substance et d’une qualité en général. Or, nous observons par la conscience une substance qui est