Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/244

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l’être vivant et ses actions sous cette carapace de barbarismes hérissés et soudés ? « Il y a ce rapport entre ce qui est nous et ce qui se passe en nous, que ce qui se passe en nous ne subsiste que par nous, tandis que nous pourrions subsister sans lui. À ces propriétés opposées, nous reconnaissons dans l’élément variable du monde interne le caractère de phénoménalité, et dans l’élément invariable le caractère de réalité[1]. » Gorgibus dirait que c’est là du haut style. Et que dirait-il de ceci ? « Si la sensibilité avait le pouvoir comme elle a le désir, il ne lui resterait plus qu’à les satisfaire l’un par l’autre. Mais en nous l’accomplissement n’appartient pas à la sensibilité ; il est entre les mains de la volonté[2].» Fallait-il ce ton magistral et cet appareil psychologique pour nous apprendre cette chose si simple, que pour agir il ne suffit pas de désirer, il faut encore vouloir ? Le célèbre morceau sur le pouvoir personnel ne renferme pas un seul fait ; c’est un tissu de considérations générales, de métaphores, d’abstractions qui agissent et finissent par devenir des êtres et des personnes. On y voit des capacités, des facultés, des propriétés, un pouvoir gouvernemental, des pouvoirs exécutifs, une sensibilité, une activité locomotrice, et jamais d’événements observés,

  1. Mélanges, p. 257.
  2. Ibid., p. 144.