Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/295

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vent il ne parvienne pas à l’atteindre ; donc ils sont un bien, et dès cette vie il a raison d’y aspirer. Le sens du mot, comme un juge sévère, a démêlé l’erreur de la vérité.

D’où vient donc que M. Jouffroy, après un raisonnement si rigoureux, est tombé dans un raisonnement si faible ? Nous arrivons à la seconde interprétation du mot destinée. Pendant tout le morceau, les deux sens se confondent, et ils sont pris l’un pour l’autre à chaque instant.

Quelle est la fin d’une locomotive ? Traîner des fardeaux ; ici le mot fin indique un but préconçu, en vue duquel l’objet a été construit et organisé. Non-seulement nous remarquons ici, comme dans le cas précédent, que le transport des fardeaux est l’effet principal et ordinaire de la machine ; mais nous jugeons qu’il est sa cause ; un savant mécanicien s’est proposé ce but ; et le but a déterminé la quantité du fer, la disposition des roues, l’établissement des pistons, l’épaisseur de la chaudière, le choix du combustible, et le reste. Le sens est tout autre : l’effet est devenu cause, et il y a ici un architecte de plus. Regardez chez M. Jouffroy, voici l’architecte.

{{Taille|De même que, dans une grande machine composée de mille rouages, nous savons que chaque rouage accomplit un certain mouvement, et nous croyons que ce mouvement contribue pour sa part au mouvement de la ma-