Page:Taine - Voyage en Italie, t. 1, 1874.djvu/327

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Je n’ai pas grand’chose à te dire de Santa-Maria in Transtevere ni des autres églises ; les impressions déjà reçues s’y répètent. Une double rangée de colonnes empruntées à un temple antique, un plafond plat surchargé de bossages et de moulures d’or, une Assomption du Guide trop haut placée, effacée par cet entassement de dorures, une abside ronde où de vieilles figures raides se détachent sur un fond d’or, des statues de morts couchées gravement et dormant pour toujours sur leur tombe, voilà Sainte-Marie in Transtevere. Chaque église pourtant a son caractère propre ou quelque pièce frappante. — À San-Pietro in Montorio, c’est une Flagellation de Sébastien del Piombo ; les attitudes sculpturales, les vigoureux corps, les muscles tendus et tordus du patient et des bourreaux rappellent que Michel-Ange fut le conseiller du peintre et souvent son maître. — À San-Clemente, c’est une église enfouie, nouvellement déterrée, où parmi des colonnes de vert antique, sous la clarté d’une torche, on voit des peintures qui passent pour les plus vieilles de Rome, raides et piteuses figures byzantines, une vierge dont la poitrine tombe comme celle d’une bête à lait. — À San-Francesco à Ripa, c’est une décoration intérieure de dorures et de marbres la plus fastueuse et la plus exagérée qu’on puisse voir, construite au siècle dernier par les corporations de métiers, savetiers, fruitiers, meuniers, chaque morceau portant le nom de la corporation qui l’a fourni. Il y a ainsi, presque dans chaque rue, un curieux fragment d’histoire. Ce qui n’est pas moins frappant, c’est le contraste de l’église et de ses alentours. Au sortir de San-Francesco à Ripa, on se bouche le nez, tant l’odeur de la morue est forte ; le