humain et les améliorations multipliées de la condition humaine contribuent chaque jour à l’augmenter. Suffira-t-elle à soutenir l’Italie ? C’est une question de mécanique morale, et nous ne pouvons la résoudre faute de moyens pour comparer la puissance du levier et la résistance du poids. En attendant, regardons les petits faits qui nous entourent ; c’est la seule façon d’arriver à quelque évaluation approximative des forces que nous voyons, mais que nous ne mesurons pas.
Sur la route passent des conscrits en veste grise, des soldats en uniforme, parfois de jolis officiers en costume bleu, l’air élégant et brillant. Chaque petite ville a sa garde nationale : l’on voit ces gardes sur un banc de pierre, au soleil, à l’entrée de la mairie ; les rues portent les noms de Victor-Emmanuel, de Garibaldi, de Solferino. Les gens s’enivrent de leur indépendance nouvelle et parlent d’eux-mêmes avec une gloriole emphatique. Un Romain qui va en Suisse me dit : « Nous avons quatre cent mille soldats, six cent mille gardes nationaux ; dans deux ans l’Italie sera faite, et nous serons en état de battre les Autrichiens. » Les exagérations du patriotisme et de l’espérance sont des aiguillons utiles.
À la frontière, le douanier en chef, Piémontais, ancien soldat de Crimée, déclamait et tempêtait au milieu de la nuit, dans sa baraque de planches, contre Antonelli, Mérode, « ces brigands, ces assassins. » Il pariait des droits des nations, des devoirs du citoyen. « L’air est mauvais ici pendant quatre mois, le pays est triste, la vie est chère, on y vit seul ; mais je sers l’Italie, je l’ai déjà servie à l’armée, et j’espère bien que l’an prochain il n’y aura plus de frontière. » Remarquez que les ca-