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Page:Tallemant des Réaux - Historiettes, Mercure de France, 1906.djvu/109

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mot de foutaison comme cervaison (1). « Jamyn, dit-elle, en ronflant selon sa coutume, merdieu ! ce mot-là n’est pas en usage, je le passerois pourtant ; il est vrai qu’il est un peu vilain. »

[(1) Saison où le cerf est bon à chasser.]

Ces pestes lui supposèrent une lettre du roi Jacques d’Angleterre, par laquelle il lui demandoit sa Vie et son portrait. Elle fut six semaines à faire sa Vie. Après, elle fit barbouiller, et envoya tout cela en Angleterre, où l’on ne savoit ce que cela vouloit dire. On lui a voulu faire accroire qu’elle disoit que fornification n’étoit point un péché, et un jour qu’on lui demanda si la pédérastie n’étoit pas un crime : « À Dieu ne plaise ! répondit-elle, que je condamne ce que Socrate a pratiqué. » À son sens, la pédérastie est louable. Mais cela est assez gaillard pour une pucelle.

Saint-Amant l’a furieusement maltraitée ; car c’est d’elle et de Maillet qu’il veut parler dans le Poète crotté.

Bois-Robert la mena au cardinal de Richelieu, qui lui fit un compliment tout de vieux mots qu’il avoit pris dans son Ombre. Elle vit bien que le cardinal vouloit rire : « Vous riez de la pauvre vieille, dit-elle. Mais riez, grand génie, riez ; il faut que tout le monde contribue à votre divertissement. » Le cardinal, surpris de la présence d’esprit de cette vieille fille, lui en demanda pardon, et dit à Bois-Robert : « Il faut faire quelque chose pour mademoiselle de Gournay. Je lui donne deux cents écus de pension. — Mais elle a des domestiques, dit Bois-Robert. — Et quels ? reprit le cardinal. Mademoiselle Jamyn, répliqua Bois-Robert, bâtarde d’Amadis Jamyn, page de Ronsard. — Je lui donne cinquante livres par an, dit le cardinal. — Il y a encore ma mie Piaillon, ajouta Bois- Robert : c’est sa chatte. — Je lui donne vingt livres de pension, répondit l’Éminentissime, à condition qu’elle auroit des trippes. — Mais, monseigneur, elle a chatonné, » dit Bois- Robert.