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Page:Tallemant des Réaux - Historiettes, Mercure de France, 1906.djvu/115

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que je crois, quoiqu’il ait dit qu’il n’en eut que la petite oie, qu’elle lui accorda toute chose. Il sortit avant que l’amie fût éveillée ; et comme dans ces petites villes on est toujours les uns chez les autres, on ne trouva point étrange de le voir sortir de bonne heure d’une maison qui étoit comme une maison publique.

Depuis, son père l’a marié, et lui l’a fait par complaisance. Sa femme dit qu’il rêve tellement qu’il est quelquefois trois semaines sans croire être marié. C’est une coquette qui s’est assez mal gouvernée depuis quelque temps. Il ne s’en tourmente point. On lui dit : « Mais un tel cajole votre femme. — Ma foi, répond-il, qu’il fasse ce qu’il pourra ; je ne m’en soucie point. Il s’en lassera comme j’ai fait. » Cette indifférence a fait enrager cette femme ; elle sèche de chagrin : lui est amoureux où il peut. Une abbesse s’étant retiré dans la ville, il la logea, et sa femme un jour les surprit. Il ne fit que rengaîner, lui faire la révérence et s’en aller.


BOIS-ROBERT

Pour subsister à la cour, Bois-Robert s’avisa d’une subtile invention : il demanda à tous les grands seigneurs de quoi faire une bibliothèque. Il menoit avec lui un libraire qui recevoit ce qu’on donnoit, et il le lui vendoit moyennant tant de paraguante. Il a confessé depuis qu’il avoit escroqué cinq ou six mille francs comme cela. On n’a osé mettre le conte ouvertement dans Francion, mais on l’a mis comme si c’eût été un musicien qui eût demande pour faire un cabinet de toutes sortes d’instruments de musique. Un jour que Bois- Robert étoit avec le cardinal, alors évêque de Luçon, on apporta des chapeaux de castor. L’évêque en