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Page:Tallemant des Réaux - Historiettes, Mercure de France, 1906.djvu/216

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Il n’appartient qu’à Beaubrun

De peindre la belle brune.


Ils lui donnèrent à dîner. Ils disent qu’ils n’ont jamais vu personne manger si proprement, ni faire toute chose de meilleure grâce, ni plus à propos. La veille qu’elle partit, La Roque lui donna à souper ; elle étoit en bergère et lui en berger. Enfin on la maria à un des mieux faits de la troupe. Ce faquin s’amusa avec quelques autres à voler par les grands chemins, et fut amené prisonnier à l’Abbaye, au faubourg Saint-Germain. Elle sollicita de toute sa force et de telle façon, que le Roi envoya quérir le bailli qui lui fit voir les charges. Le Roi dit à Liance et à ses compagnes : « Vos maris ont bien la mine d’être roués. » Ils le furent, et la pauvre Liance, depuis ce temps-là, a toujours porté le deuil et n’a point dansé.


M. DE CHAMP-ROND

C’étoit un président des enquêtes qui, étant demeuré veuf assez âgé, fort avare et sans enfants, se remaria à une fort jolie personne ; mais elle ne lui dura rien. En troisièmes noces il se remaria avec la fille du marquis de Dampierre, qui étoit fort gueux : cette personne est honnêtement follette ; hors qu’elle a les cheveux roux, elle peut passer pour jolie. Il falloit souper tous les jours à sept heures et se coucher à huit : mais elle se relevoit à une heure de la nuit et ne revenoit se coucher qu’à cinq heures du matin. Je crois qu’elle se servoit de quelque drogue pour l’assoupir. Le bonhomme se levoit pour aller au palais, et ordonnoit bien qu’on ne réveillât point sa femme. Il étoit sous-doyen du parlement, car, pour monter à la grand’chambre, il avoit quitté sa commission. Quelquefois il lui prenoit des chagrins