Page:Tallemant des Réaux - Historiettes, Mercure de France, 1906.djvu/359

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de sa vie. Il parle d une épître en vers adressée par lui à Quillet, l’auteur de la Callipédie ; il faisoit avec facilité des vers de société. Ses deux Recueils manuscrits, dont il sera parlé plus bas, sont remplis d’opuscules de ce genre, parmi lesquels il seroit souvent difficile de distinguer ceux qu’il a composés lui-même de ceux dont il n’est que le copiste. Nous citerons cependant un couplet satirique, dont Tallemant est bien certainement l’auteur. Il est écrit de sa main, et surchargé de ratures, corrections et variantes, qui indiquent un travail de composition. Cette petite bluette est empreinte de cette maligne irritation, l’un des traits principaux du caractère de notre écrivain ; elle porte en marge la date de 1655. Nous pensons qu’elle aura été faite sous les impressions qui vont être indiquées.

Tallemant, comme on l’a déjà vu, étoit issu d’une bonne famille de bourgeoisie, dont une branche, suivant l’expression du temps, avoit commencé à se décrasser. Son oncle Gédéon avoit acheté une charge de secrétaire du Roi, qui, depuis Charles VIII, donnoit la noblesse, et son fils ainsi anobli étoit entré dans le Parlement Le cousin germain de des Réaux, déjà riche par lui-même, avoit épousé la fille naturelle de Montauron, le Crésus de l’époque, et se trouvoit ainsi appelé à une grande fortune. Devenu maître des requêtes, il avoit suivi la carrière des intendances, et, à force de prodigalités, il s’étoit introduit dans la familiarité des grands seigneurs, qui lui ouvroient leurs portes en lui faisant l’honneur de puiser largement dans sa bourse. La position de Tallemant des Réaux étoit très différente. Insouciant par caractère, il n’avoit pas embrassé d’état ; et par son mariage avec la fille du financier Rambouillet, ainsi que par son origine, il appartenoit à la classe des hommes de finance, que les nobles appeloient des paysans, quand ils ne les traitoient pas de maltôliers..

Dans ce siècle-là, la grande fortune ne donnoit pas à elle seule la considération ; les honneurs et les privilèges de la naissance l’emportoient sur tout, et l’on n’admettoit aucune de ces compensations qui, depuis près d’un siècle, mais surtout depuis la révolution de 1789,