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Page:Tallemant des Réaux - Historiettes, Mercure de France, 1906.djvu/55

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veux point de cet homme-là. — Hé bien ! Voulez-vous donc M. Guénebeau  ? — Non, c’est un nom de chien-courant : Guénebeau ! to to ! Guénebeau ! . Voulez-vous donc M. Dacier ? — Encore moins, il est plus dur que le fer. — Il faut donc M. Provins ? » Il y consentit.

Quand on lui montroit des vers où il y avoit des mots qui ne servoient qu’à la mesure ou à la rime, il disoit que c’était une bride de cheval attachée avec une aiguillette.

Un homme de robe de fort bonne condition lui apporta d’assez fichus vers qu’il avoit faits à la louange d’une dame, et lui dit, avant que de les lui lire, que des considérations l’avoient obligé à les faire. Malherbe les lut d’un air fort chagrin, et lui dit : « Avez-vous été condamné à être pendu, ou à faire ces vers  ? car, à moins que de cela, on ne vous le sauroit pardonner. »

Il n’étoit pas autrement persuadé de l’autre vie, et disoit, quand on lui parloit de l’enfer ou du paradis : « J’ai vécu comme les autres, je veux mourir comme les autres, et aller où vont les autres. »

On dit qu’une heure avant que de mourir, il se réveilla comme en sursaut d’un grand assoupissement, pour reprendre son hôtesse, qui lui servoit de garde, d’un mot qui n’étoit pas bien français, à son gré ; et comme son confesseur lui en voulut faire réprimande, il lui dit qu’il n’avoit pu s’en empêcher, et qu’il avoit voulu jusqu’à la mort maintenir la pureté de la langue françoise.


M. DES YVETAUX

M. des Yvetaux se nommoit Vauquelin, et étoit d’une bonne famille de Caen. Il y a exercé la charge de lieutenant- général, dont il fut interdit après par arrêt du parlement