Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/115

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fort adroite et fort née pour la cour. Elle étoit de toutes les intrigues, soit d’amour, soit d’autre chose. Six mois après la mort d’Henri IV, une certaine demoiselle Coetman[1], une petite bossue, qui se fourroit partout et qui se faisoit toujours de fête, l’accusa d’avoir été d’intelligence avec M. d’Épernon pour faire assassiner Henri IV. Ravaillac, qui étoit d’Angoulême, dont M. d’Épernon étoit gouverneur, fut six mois chez elle comme chez la bonne amie du duc, mais quelques années avant que de faire le coup. La Coetman ne disoit point que la Reine-mère fût du complot ; mais on ajoutoit dans le monde que M. d’Épernon l’avoit fait faire pour lui faire plaisir. Faute de preuves, et pour assoupir une affaire qui n’étoit pas bonne à ébruiter[2], la Coetman fut condamnée à mourir entre quatre murailles ; elle fut mise aux Filles repenties, où on lui fit faire une petite logette grillée dans la cour, et elle y est morte quelques années après.

Une extravagante madame de Poyanne battit une fois la pauvre mademoiselle du Tillet, sur le quai des Augustins, comme elle retournoit seule de la messe. Elles avoient eu querelle pour une suivante. Sigogne[3]

  1. Jacqueline Le Voyer, dite de Comant ou de Coetman, femme d’Isaac de Varenne.
  2. Le passage imprimé en lettres italiques est biffé dans le manuscrit de Tallemant ; mais avec quelque soin on parvient encore à le lire sous les ratures, et nous avons cru devoir le rétablir.
  3. Sigogne est un poète satirique dont les œuvres n’ont pas été recueillies, et dont aucune biographie n’a parlé. Le Combat d’Ursine et de Perrette, parodie de la dispute de madame de Poyanne et de mademoiselle du Tillet, se trouve dans la deuxième partie du Cabinet satirique. Cette pièce y est suivie d’une Réponse, par Motin. Ce Recueil, licencieux et rare, contient un grand nombre de satires en vers par Sigogne, Motin, Desportes, Maynard, Régnier et d’autres poètes du