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le capitaine Luynes, à cause peut-être de quelque chaumière qui se nommoit ainsi. Ce capitaine Luynes étoit homme de service. Il eut le gouvernement du Pont-Saint-Esprit, puis de Beaucaire, et mena deux mille hommes des Cévennes à M. d’Alençon en Flandre. Au lieu de Aubert, il signa d’Albert. Il fit amitié avec un gentilhomme de ces pays-là nommé Contade, qui connoissoit M. le comte Du Lude[1], grand-père de celui d’aujourd’hui, fit en sorte que le fils aîné de ce capitaine Luynes fut reçu page de la chambre, sous M. de Bellegarde. Après avoir quitté la livrée, ce jeune garçon fut ordinaire[2] chez le Roi. C’était quelque chose de plus alors que ce n’est à cette heure. Il aimoit les oiseaux et s’y entendoit. Il s’attachoit fort au Roi, et commença à lui plaire en dressant des pies-grièches.

La Reine-mère et le maréchal d’Ancre, qui avoient éloigné le grand prieur de Vendôme, et ensuite le commandeur de Souvré[3] d’aujourd’hui, puis Montpouillun, fils du maréchal de La Force, parce que le Roi leur avoit témoigné de la bonne volonté, ne se défièrent point de ce jeune homme qui n’étoit point de naissance.

Il avoit deux frères avec lui. L’un se nommoit Brante, et l’autre Cadenet. Ils étoient tous trois beaux

  1. C’est ce qui fut cause que le comte Du Lude, après M. de Brèves, fut gouverneur de M. d’Orléans ; puis le maréchal d’Ornano le fut, et ensuite M. de Bellegarde eut soin de sa conduite, sans qualité de gouverneur. (T.)
  2. Ordinaire, c’est-à-dire gentilhomme ordinaire de la chambre du Roi.
  3. Jacques de Souvré, fils de Gilles de Souvré, maréchal de France. Il devint grand-prieur de France, en 1667. C’est lui qui a fait bâtir le palais du Temple. Le nom de cette maison s’écrivoit Souvré, nous avons sous les yeux une quittance signée par le maréchal ; mais il est souvent écrit Souvray dans les Mémoires du temps.