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garçons. Cadenet, depuis duc de Chaulnes et maréchal de France, avoit la tête belle et portoit une moustache que l’on a depuis appelée une cadenette. On disoit qu’à tous trois ils n’avoient qu’un bel habit qu’ils prenoient tour à tour pour aller au Louvre, et qu’ils n’avoient aussi qu’un bidet. Leur union cependant a fort servi à leur fortune.

M. de Luynes fit entreprendre au Roi de se défaire du maréchal d’Ancre, afin de l’engager à pousser la Reine sa mère ; mais le Roi avoit si peur, et peut-être son favori aussi, car on ne l’accusoit pas d’être trop vaillant, ni ses frères non plus, qu’on fit tenir des chevaux prêts pour s’enfuir à Soissons, en cas qu’on manquât le coup.

On chantoit entre autres couplets celui-ci contre eux :

D’enfer le chien à trois têtes
Garde l’huis avec effroi,
En France trois grosses bêtes
Gardent d’approcher le Roi.

De Luynes, tout puissant, épouse mademoiselle de Montbazon, depuis madame de Chevreuse[1]. Le vidame d’Amiens, qui pouvoit faire épouser à sa fille, héritière de Pequigny, M. le duc de Fronsac, fils du comte de Saint-Paul, aima mieux, par une ridicule ambition, la donner à Cadenet, et le prince de Tingry donna sa fille à Brante, qu’on appela depuis cela M. de Luxembourg. Il mourut jeune.

On dit que le connétable disoit, allant faire la guerre aux Huguenots, qu’au retour il apprendroit l’art militaire de la guerre. M. de Chaulnes, à Saint-Jean-

  1. Marie de Rohan, morte le 12 août 1679.