Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 2.djvu/183

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et dans l’emportement pour se faire tenir jeu, il dit : « Ne craignez pas que je vous fasse banqueroute, voilà un billet de quatre mille écus qui ne doit rien à personne. » Paget le prit, et au lieu, il lui donna un placet que l’autre serra. En se couchant, Bois-Robert reconnoît sa bévue, il envoie chez l’homme d’affaires donner les avis qu’il étoit expédient de donner, et, en pantalon de ratine, il va faire un bruit de diable chez Paget, qui lui rendit son billet, mais ne le voulut voir depuis.

Madame de Châtillon, sa voisine, fut la première qui le porta à faire une fin bien chrétienne. Il disoit aux assistans : « Oubliez Bois-Robert vivant, et ne considérez que Bois-Robert mourant. » Comme son confesseur lui disoit que Dieu avoit pardonné à de plus grands coupables que lui : « Oui, mon père, il y en a de plus grands. L’abbé de Villarceaux, mon hôte (il lui en vouloit, parce qu’il avoit perdu son argent contre lui), est sans doute plus grand pécheur que moi, cependant je ne désespère pas que Dieu ne lui fasse miséricorde. » Madame de Thoré lui disoit : « Monsieur l’abbé, la contrition est une vertu…, etc., etc. Eh ! madame, je vous la souhaite de tout mon cœur. » Il fut avare jusqu’à la fin, et vouloit que son neveu s’habillât d’un habit qu’il laissoit, au lieu de le donner à un pauvre valet-de-chambre qu’il avoit.

Il disoit : « Je me contenterois d’être aussi bien avec Notre-Seigneur, que j’ai été avec le cardinal de Richelieu. »

Comme il tenoit le crucifix, et qu’il demandoit pardon à Dieu : « Ah ! se dit-il, au diable soit ce vilain