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lier le bras droit et battit pourtant son homme. Il logeoit chez le maréchal ; depuis il est mort de maladie.

Bassompierre gagnoit tous les ans cinquante mille écus à M. de Guise ; madame de Guise lui offrit dix mille écus par an et qu’il ne jouât plus contre son mari ; il répondit comme le maître-d’hôtel du maréchal de Biron : « J’y perdrois trop. »

Il a toujours été fort civil et fort galant. Un de ses laquais ayant vu une dame traverser la cour du Louvre, sans que personne lui portât la robe, alla la prendre en disant : « Encore ne sera-t-il pas dit qu’un laquais de M. le maréchal de Bassompierre laisse une dame comme cela. » C’étoit la feue comtesse de La Suze ; elle le dit au maréchal, qui sur l’heure le fit valet-de-chambre.

Il seroit à souhaiter qu’il y eût toujours à la cour quelqu’un comme lui ; il en faisoit l’honneur[1], il recevoit et divertissoit les étrangers. Je disois qu’il étoit à la cour ce que Bel Accueil est dans le Roman de la Rose. Cela faisoit qu’on appeloit partout Bassompierre ceux qui excelloient en bonne mine et en propreté. Une courtisane se fit appeler à cause de cela la Bassompierre, une autre fut nommée ainsi parce qu’elle étoit de belle humeur. Un garçon qui portoit en chaise sur les montagnes de Savoie fut surnommé Bassompierre, parce qu’il avoit engrossé deux filles à Genève. À propos de ce surnom de Bassompierre, il lui arriva une fois une plaisante aventure sur la rivière

  1. On diroit aujourd’hui les honneurs.