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grande licence, à cause de M. de Candale, se mit à badiner avec mademoiselle de Rohan, qui n’avoit alors que douze ans.

 ....... Mais aux âmes bien nées,
La vertu n’attend pas le nombre des années[1].


Cela dura jusqu’à l’âge de quinze ans, qu’à Paris il en eut tout ce qu’il voulut. Ruvigny étoit rousseau, mais la familiarité est une étrange chose ; puis il étoit en réputation de brave. Il s’étoit trouvé par hasard à Venise, cherchant la guerre ; il étoit allé à Mantoue ; là, Plassac, frère de Saint-Prueil, brave garçon, mais qui, avant de mettre l’épée à la main, avoit un tremblement de tout le corps, eut querelle. Ruvigny le servit et eut affaire à Bois-d’Almais, un bravissime, qui avoit disputé la faveur de M. Puy-Laurens[2] ; Ruvigny le tua, mais il reçut un grand coup d’épée au côté. M. de Mantoue, qui avoit logé tous les cavaliers françois dans son palais, par bienséance, pria le blessé de se faire porter dans une maison de la ville ; mais il lui

  1. Vers du Cid. (T.)
  2. Bois d’Almais, ou Bois d’Annemets, comme on le nomme le plus souvent, est l’auteur des Mémoires d’un favori de M. le duc d’Orléans. On verra plus bas, à l’article Ruqueville, que Bois d’Annemets étoit frère de ce dernier. Les Mémoires d’un favori sont assez rares, et d’autant plus recherchés qu’ils n’ont pas été reproduits dans la Collection des Mémoires relatifs à l’histoire de France. Goulas, gentilhomme ordinaire de Gaston, duc d’Orléans, a fait connoître dans ses Mémoires restés manuscrits, le duel dans lequel succomba l’auteur des Mémoires d’un favori. Cet événement eut lieu en 1627. (Voyez un fragment de ces Mémoires cité dans la Bibliothèque historique du P. Lelong, sous le n° 21395, t. 2, p. 449.)