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DOCUMENTS INÉDITS SUR GASSENDI.

encore incommodé de la poictrine, devant mesme estre prestre[1] et bien longtemps encore après fort il instruisoit et preschoit le peuple. On l’a veu dans Aix, dans Grenoble, faire des prédications. À Digne il en fesoit fort souvent et n’ozoit point s’hasarder à tousjours prescher dans les grandes églises, mais il alloit le plus souvent prescher dans des petites, comme couvens de religieuses, etc.

Il fut contraint de quitter ce saint exercice à cause des grandes maladies qu’il en avoit, et voyant cela il s’appliqua à instruire encore le peuple non de la voix, mais de la plume, en l’incitant par la connoissance des choses naturelles à la connoissance du vray Dieu.

Lorsqu’il estoit dans son bénéfice à Digne, il ne manquoit jamais d’assister au Service, d’aller à la Grande Messe, ouïr la prédication, s’il y en avoit, et d’aller aux Vespres.

Quand il luy estoit arrivé quelque accident, il ne s’en estonnoit poinct disant que dans la condition des choses humaines beaucoup de choses peuvent arriver au-delà de nos attentes, qu’il se faut reposer seulement sur la volonté de Dieu.

Quand il se voyoit malade, il estoit tousjours resolu de soufrir pour l’amour de Dieu tout ce qui luy pouvoit arriver. Il ne trouvoit rien d’estrange. On ne luy a jamais qu’ouy dire : Mon Dieu, je veux tout ce que vous voulez ; fiat voluntas tua, etc.

Aussitôt qu’il se voyait malade en moindre peril, il demandoit et recevoit le Saint Sacrement et réiteroit, quand la maladie estoit longue.

Dans sa dernière, comme il se sentoit peu à peu mourir, craignant que son bénéfice ne tombast entre les mains de quelqu’un incapable de bien faire l’office à la gloire de Dieu, il le résigna à une personne capable[2].

Il recommanda fort souvent à son confesseur de le venir voir tous les jours et de bien prendre garde à luy faire recevoir le saint sacrement de l’Extresme-Onction lorsqu’il verroit qu’il seroit temps, à quoy le confesseur veilla et ne manqua de luy faire recevoir, lequel il receut dévotement et avec toute l’attention et sainteté d’esprit qu’on pourroit souhaiter[3].

Le soir devant sa mort il pria encor son confesseur de le réconcilier, luy donner l’absolution, et luy dire ses belles paroles pour sortir de ce monde, ce qui fut faict.

Le lendemain, quatre heures devant mourir, il luy demanda encor l’absolution et le supplia de faire les prières tout bas auprès de luy, ce qu’il fit.

Dans tous les livres qu’il a fait, il proteste tousjours que sa volonté est de

  1. Avant même d’être prêtre. Les sermons dont le biographe va parler étaient si beaux, dit Bougerel (p. 30), que, longtemps après sa mort, Bernier, qui en était le dépositaire, voulait en faire un présent au public.
  2. Præposituram transcripserat sequenti, disent les auteurs du Gallia (t. XIII, col. 1140) : Nicolaus Taxil canonicus Diniensus, Petri cessione fit præpositus et admittitur 30 octob. 1655.
  3. Bougerel dit (p.411) : « Il reçut aussi l’Extrême-Onction avec un grand recueillement, et avec tant de présence d’esprit, que le Prêtre s’étant mépris en récitant Les prières des onctions, il le redressa. » Plus loin (p. 419), Bougerel rappelle que Montmor a loué la piété que Gassendi fit paraître pendant sa maladie.