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DOCUMENTS INÉDITS SUR GASSENDI.

souris, que lorsque les éclipses arrivaient, il falloit qu’il courut après[1], etc.

Durant la comète dernière[2], je l’ay veu tous les soirs et les matins au plus grand froid de l’hyver y passer des deux ou trois heures à l’observer, pendant mesme qu’il estoit à demy malade.

Il estoit si exact et si patient dans ce travail qu’on n’y scaureit rien adjouster.


Particularités diverses[3]


Jamais il ne célébroit la messe qu’il ne se réconciliait devant au premier prestre confesseur qui se rencontroit.

Jamais il n’a voulu retirer aucun argent pour toutes les messes qu’il disoit.

Dans son église cathédrale de Digne, lorsqu’il y avoit des distributions fortuites, il n’en prenoit jamais, il donnoit sa part à quelques pauvres ecclésiastiques ou bien la distribuoit en aumosnes aux pauvres.

Jamais il n’entreprit d’actions qu’il ne se fit donner la bénédiction.

Sa piété fut sans feintise ; sa vie humble, innocente, débonnaire ; ses mœurs douces, complaisantes, aggréables.

De sa bouche jamais ne sont sorties que des paroles chrestiennes ; jamais on l’a oüy proférer le moindre jurement, et il ne pouvoit soufrir qu’on en fit aucun en sa compagnie sans en montrer son déplaisir tout doucement.

Aussi il n’a jamais offensé personne ny querelé.

Il a tousjours eu pour les choses saintes une vénération très-grande.

Il a aymé son prochain comme soy-mesme, ayant consacré sa vie pour son instruction.

Il portoit un amour très grand à ses parens.

Aussi il aimoit cordialement ses amis pour lesquels il (s’) employoit entièrement, lorsqu’il sçavoit leur pouvoir rendre quelques services ; aussi jusqu’à la mort, il a parlé d’eux.

Il a tousjours eu un respect si grand pour les commandemens de Dieu et de l’Église, qu’il a tousjours fait exactement les jeunes, veilles, les caresmes, et que mesmes lorsqu’il estoit indisposé et malade, il ne peuvoit se résoudre à les enfraindre, quoyque ce fut par ordonnances des médecins et permissions des confesseurs[4].

  1. Cette naïve comparaison nous donne une idée de l’aimable enjouement de la conversation de Gassendi, et il faut savoir gré à La Poterie de nous avoir conservé une aussi vive et aussi pittoresque saillie.
  2. Il s’agit de la comète de 1652 dont le passage au périhélie est du 12 novembre (F. Arago, Catalogue des comètes calculées, p. 302 du t. II de l’Astronomie populaire). On regrette que l’ancien directeur de l’Observatoire n’ait pas consacré une notice spéciale à Gassendi dans les Biographies des principaux astronomes (Notices biographiques, t. III, p. 157-515).
  3. J’ai cru devoir donner ce titre aux notes qui se rapportent plus à la façon d’observer de Gassendi, quoique rien ne distingue les unes des autres. Ces dernières notes renferment des indications qui ne se retrouvent pas dans Bougerel et dans ses devanciers.
  4. Guy Patin confirme ainsi le témoignage de La Poterie (Lettre du 23 février 1655) : « M. Gassendi a voulu faire la carême, et s’en est fort mal trouvé. Je l’en avois averti, mais il a voulu attendre que le mal le surprit. »