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INTRODUCTION.

est formulé ; mais dès auparavant la tendance qu’il indique se prononçait des côtés les plus divers. Or, à ce mouvement, l’ancien stoïcisme surtout devait perdre, tout compte fait : sa logique n’est plus sérieusement défendue et disparaît devant celle d’Aristote ; celui-ci, depuis Andronicus, gagne de plus en plus ; le grandiose monument scientifique qu’il a élevé, est unanimement apprécié à sa haute valeur. Toutefois, Platon reste le Maître par excellence, quoique de nombreux adeptes des doctrines propagées sous le nom de Pythagore, dans des écrits plus ou moins apocryphes, essaient d’élever au même niveau la gloire légendaire du mystique Samien.

Qu’un homme de génie vienne maintenant, à l’heure propice, donner une formule définitive à ce syncrétisme inconsciemment préparé, une nouvelle philosophie sera fondée[1] et elle ralliera nécessairement toutes les forces vives de l’hellénisme, après la banqueroute du stoïcisme officiel. Mais cette profonde et remarquable transformation n’en sera pas moins insuffisante pour empêcher le triomphe politique du christianisme et l’ouverture d’une ère nouvelle.

5. Si, pour désigner cette nouvelle période, de Constantin à Héraclius, on cherche un autre terme que celui de décadence, qui est le vrai, on ne pourrait, je crois, mieux la qualifier qu’en disant : l’âge des commentateurs. Commenter et compiler pour commenter, ce semble, en effet, être le seul but des travailleurs de ce temps, soit en sciences, soit en philosophie. Sans doute, ils ne sont pas les premiers à se livrer à l’interprétation des vieux maîtres ; ils ne font que suivre l’impulsion de l’époque précédente ; mais désormais toute originalité fait défaut, la pure servilité s’introduit. Les matières de l’enseignement ont pris un caractère traditionnel ; on ne peut plus sortir d’un cadre de plus en plus restreint. Ce cadre, les anciens maîtres l’ont rempli et l’on désespère de dire mieux qu’eux ; il s’agit seulement d’expliquer et de faire bien comprendre ce qu’ils ont dit.

Mathématiques ou philosophie, que ce soit Théon d’Alexandrie

  1. Le nom d’école d’Alexandrie, qu’on applique d’ordinaire à cette philosophie, est assez peu justifié, en ce qui la concerne, et devrait être réservé pour les littérateurs et savants contemporains des Ptolémées. Quelle qu’ait été l’origine d’Ammonius Saccas et de Plotin, les plus illustres représentants de la nouvelle doctrine ont vécu de fait, soit à Rome, soit à Athènes, et l’Égypte n’en a jamais été le centre véritable.