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MÉLANGES

dans les lettres. Ces amis qui, nous assure M. Pacaud, sont des littérateurs distingués, retenez bien ce mot, se laissent toucher de compassion et conviennent entre eux de bâtir, pour l’édition du samedi, une chronique « fort intéressante. » Et, dit l’Électeur « nous commençons dès aujourd’hui ! »

Ainsi, M. Pacaud se porte garant de l’intérêt de sa chronique hebdomadaire. Il donne sa parole d’honneur que l’œuvre de ses amis lettrés va faire oublier l’ennui que causent ses articles chiffrés. Enfin, cette fameuse chronique est comme le non moins fameux baume du bon Samaritain qui guérit de tous maux.

À propos de ce baume, on sait qu’il est débité sur le marché Champlain par un individu excentrique qui tourne mieux un boniment que M. Pacaud.

« Ah que ! ces messieurs, qu’il n’y a qu’une maladie qui ronge le corps de l’homme, c’est la maladie de la douleur ! Prenez une bouteille et si une bouteille ne fait pas vous en prendrez deux. »

Le bon Samaritain a tout un chapitre sur ce ton. Mon ami Alfred Cloutier vous déclame ça à la perfection. Je conseille à M. Pacaud d’engager le bon Samaritain pour annoncer sa chronique ; il le ferait mieux que lui. Et, en vérité, il faudrait toute l’éloquence de ce célèbre charlatan du marché Champlain pour faire prendre la susdite chronique, même à petite dose. Ce n’est pas M. Pacaud qui pourra jamais faire accroire à quelqu’un que c’est drôle. Comme on dit en canadien, il n’est pas capable pour. Ou plutôt c’est drôle à force de ne l’être pas. Voyons un peu.

Le chroniqueur de M. Pacaud est d’une naïveté invraisemblable. On lui a confié le soin de réveiller périodiquement les abonnés de l’Électeur du profond assoupissement où les plongent les articles sérieux que pond M. le rédacteur en chef. Cette besogne, en comparaison de laquelle le nettoyage des écuries d’Augias était un jeu d’enfant, l’épouvante à bon droit, et il murmure doucement :


Avant d’y avoir songé sérieusement je ne m’étais pas figuré la grandeur de la tâche que je m’étais imposée.