Page:Tastu - Poésies nouvelles, 3ème édition, 1838.djvu/258

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
250
DANTE.

» Toi qui regorges d’or, de paix et de sagesse ;
» Les faits, si je dis vrai, sont là pour démentir
» Quiconque m’oserait accuser de mentir…
» Sparte, Athènes, berceau des lois, des mœurs antiques,
» Ont fait pauvre labeur près de tes politiques,
» Qui de leurs doigts subtils ont si bien travaillé,
» Qu’en novembre est à bout ce qu’octobre a filé !
 » Combien de fois, un temps si bref qu’on s’en effraie
» A vu changer tes chefs, tes couleurs, ta monnaie ;
» Renouveler tes noms, tes hommes, tes emplois !…
» Or, si tu te souviens, et vois clair une fois,
» C’est ainsi que, luttant contre un mal qui l’irrite,
» Un malade inquiet sur la plume s’agite,
» Et cherche avec effort, durant la longue nuit,
» De l’un à l’autre flanc le repos qui le fuit !… »

Qui vois-je là !… C’est lui ! Sa taille haute et droite
Dessine sa maigreur sous une robe étroite :
Narguant de sa raideur nos tissus assouplis,
De ses épaules tombe une chape à longs plis ;
Du chaperon pendant sa tête enveloppée,
S’incline quelque peu, grave et préoccupée,
Et sur son front se courbe un laurier desséché,
Que le feu de l’abîme a peut-être touché.
Lent et fier dans son geste, et calme dans sa pose…
Le repos du lion, alors qu’il se repose !
— « Toi joûter contre moi, dit-il avec dédain !
» Toi poser ta main frêle entre mes doigts d’airain !
» Toi marcher à mon pas ! toi juger ! toi maudire ? »
Et sa lèvre retint tout ce qu’il m’allait dire.