Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/280

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Alors, à demi-voix, on dit l’oraison suivante, oraison spirite :

— Ô toi, Whamg-tchin-fou, esprit des os et des vertèbres, esprit des articulations, toi qui appartiens au ciel de Lucifer où tu résides, Adonaï ni son fils Yé-Su ne peuvent rien sur toi !… Nous t’évoquons au nom du Dieu le plus grand et le meilleur ; tu entendras notre appel… Viens, oh ! viens animer ce crâne, ces vertèbres ; fais que ce squelette nous parle, qu’il nous réponde. Oh ! viens, esprit, peresprit des os… Whamg-tchin-fou ! Whamg-tchin-fou !…

Il y eut un instant de silence ; puis, on entendit comme une sorte de grésillement dans l’air, pendant qu’une voix sortait du cercueil, disant : Whamg-tchin-fou ! Whamg-tchin-fou ! Après quoi, il se fit à l’intérieur un grand cliquetis d’ossements ; je me penchai, et je vis le squelette s’agiter. C’était un squelette en parfait état, fort bien articulé, comme ceux que vendent à Paris, aux environs de l’école de médecine, certains boutiquiers spécialistes, commerçants en anatomie.

Les onze médiums appuyèrent plus fort leurs mains, et l’on recommença l’évocation.

Alors, tout à coup, toutes les mains furent rejetées, pendant que les médiums, renversés par une force invisible, trébuchèrent sur leurs sièges, et nous vîmes se dresser debout, tandis que ses os cliquetaient et que sa mâchoire semblait grimacer un rictus funèbre, le squelette, dont la tête, s’abaissant et se tournant à droite et à gauche, avait l’air de passer en revue tous les gens assis, au-dessous de lui.

Puis, il leva la jambe gauche, enjambe la paroi du cercueil, sauta par terre avec un « clac » sec, vacille un instant, et finalement tomba sur une chaise qu’un dignitaire, doucement et sur la pointe du pied, était venu placer derrière lui.

Un silence profond régnait maintenant dans le temple, tandis que la lumière extérieure (on était en plein jour) pénétrait, vive, brillante, clarifiée, si l’on peut dire, en passant à travers les larges baies de cristal du plafond, et inondait, comme d’une lueur électrique, cet étrange squelette aux os blancs.

Celui-ci ne remuait plus, à présent. Le grand-sage, par derrière, lui fit des passes magnétiques, du haut en bas, lançant les bras vers lui, le baignant d’un vrai déluge de fluide. D’autre part, les onze médiums s’étaient réunis de nouveau, avaient transporté leurs sièges autour du squelette, qu’ils enserraient de leur cercle, se tenant par la main et se touchant, en outre, par l’extrémité des pieds. Le grand-sage, alors, posa son index sur la rotule gauche du squelette ; mais celui-ci ne bougea encore pas.

Les frères de la San-ho-hoeï commencèrent une prière incantatoire,