Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/587

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qui ne vous le prouvent. Examinez maintenant ses mains, longues, sèches et crochues, aux ongles recourbés et bleuis comme des extrémités où la nutrition se fait mal, et avec cela cette chaleur de la peau, constatable au simple serrement de main ; remarquez encore cet état subfébrile constant, ces rougeurs alternées avec des pâleurs, ces injections de toute une oreille, l’autre restant pâle et comme anémique ; tout chez cet homme, en un mot, atteste, démontre jusqu’à l’évidence que vaso-moteurs, comme cèrébro-spinaux, grand sympathique comme central, tout son système nerveux est altéré et fonctionne anormalement.

« Sans le vouloir, messieurs, et en vous dépeignant un homme, je viens de vous faire le portrait du pseudo-médium sincère, du pseudo-spirite pratiquant à la fois avec science et fanatisme convaincu, et qui est anatomiquement désigné pour arriver là.

« En l’état, messieurs, il est donc bien certain, et vous me l’accorderez, que l’intelligence de cet homme ainsi constitué, alors qu’elle se sert du cerveau c’est-à-dire du système nerveux altéré, doit être, elle aussi, altérée en certains points. Il est difficile de jouer juste sur un piano faux.

« De même, cependant, que les troubles vitaux que je viens de vous signaler dans la sphère de la vie animale sont absolument compatibles avec une vie, une existence, une santé, dans lesquelles rien, en apparence tout au moins, ne semble troublé aux yeux de l’observateur superficiel, de même que le névropathe paraît en excellente santé, de même dans la sphère intellectuelle l’intelligence paraît chez lui absolument nette et lucide.

« Pourtant, il n’en est rien.

« Il se passe, en effet, chez lui, dans le domaine intellectuel, en dehors bien entendu du cours normal des choses, des phénomènes en deçà ou en delà des manies, monomanies seules ou associées, qui font de cette intelligence une déséquilibrée, alors même qu’il y paraît le moins.

« Primesautier, vivace, et profond d’une intelligence hors ligne, aussi en certains points très apparents le névropathe apparaît par d’autres côtés plein de trous, de lacunes. Une assimilation rapide, brillante, mais incomplète, lui fait digérer stomacalement des choses improbables et impossibles au vulgaire, comme elle lui fait digérer aussi, intellectuellement, des choses improbables et impossibles au vulgaire. Quant à lui, inconscient de son état, il trouve cela tout naturel.

« Le névropathe à tendances ordurières se complaira dans l’ordure, et le névropathe à monomanies d’ordre plus élevé tombera ou versera dans le prétendu spiritisme. Dès lors, sa volonté aura sombré ; il fera abnégation de son libre arbitre ; il est perdu, s’il n’a pas la force de caractère nécessaire pour réagir vigoureusement, ou s’il n’a rien au-dessus à quoi