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témoigna le général libre-penseur, je ne puis m’empêcher de la comparer à celle qui unit, il y a cent ans, Voltaire et La Harpe, et qui survécut à la conversion de ce dernier.

L’histoire de La Harpe est un peu la mienne, avec cette différence que son erreur dura quarante ans ; mais aussi, la secousse qui le rejeta hors de l’abîme fut plus violente que celle éprouvée par moi. Républicain ardent, impie forcené, il fut abreuvé d’outrages par les démocrates irréligieux, ses complices des jours d’égarement. J’ai été, pour ma part, en butte aux plus infâmes attaques des miens, sans avoir bu cependant autant que La Harpe la lie des amertumes. On sait que le disciple préféré de Voltaire retrouva la foi dans la prison du Luxembourg, où il avait été jeté par ses amis révolutionnaires, pendant la Terreur. Il lui fallut la persécution poussée à ses dernières limites pour comprendre que, pendant quarante années, il s’était fourvoyé dans le parti des haines les plus atroces, parmi des hommes pires que les loups ; car les loups, dit le proverbe, ne se dévorent pas entre eux.

Et La Harpe, éclairé, n’en demeura pas moins fidèle à ses vieilles affections. « Il resta constamment l’admirateur du génie et l’ami