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Mais, au retour, la faim le prit et, succombant à la tentation, il mangea une cuisse du poulet.

Le Seigneur, voyant que la bête n’avait qu’une patte, gronda :

« Qu’est-ce que c’est ?… Il lui manque une cuisse !… Où est-elle restée ? »

« Je n’en sais rien, Maître. Il est certain que j’ai reçu ce poulet comme ça. Je pense qu’ici ces oiseaux n’ont qu’une patte ! »

« Ce n’est pas possible !… Tous les poulets en ont deux, je t’assure !… J’ai fait ces bêtes moi-même ! »

La querelle cessa. On mangea bien et — ventre rempli, cœur réjoui ! — on se tut[1].

Quelque temps après, le Christ et saint Pierre se promenaient dans les environs de Jérusalem. Et comme le disciple aperçut, près d’une haie, des poulets qui se tenaient sur une patte, il s’écria joyeusement :

« Voyez-vous bien, Maître, qu’ici les poulets n’ont qu’une seule patte ?… Et vous en doutiez cependant l’autre jour ! »

« Un instant, Pierre ! »

Le Seigneur fit prrr ! et frappa dans les mains. Et toutes les bêtes se mirent à courir sur deux pattes en même temps !

« Qui de nous deux a raison ? » demanda le Christ en riant.

« Je crois bien, » s’écria saint Pierre, « c’est Dieu qui vous inspire ! Il n’y a rien d’extraordinaire à cela si, l’autre jour, vous aviez fait prrr ! le poulet rôti aurait eu aussi deux pattes ![2]. »

(Denderleeuw : vallée de la Dendre.)

la kermesse.

Ceci se passa dans le temps que Notre-Seigneur se promenait sur la terre.

  1. Buikske vul, berteke rust !
  2. Volkskunde, II, 88. Communication de A. De Cock.